I- Définition

Le portrait est une forme de la description, appli­quée à un personnage. Il se rencontre dans le roman, mais aussi dans le dialogue de théâtre ou en poésie. Au XVIIe siècle, c’est presque un « genre » à part entière. Un portrait se définit par des caractères spécifiques qui permettent de l’identifier, de l'analyser et de déterminer sa fonc­tion. Il existe plusieurs types de portraits.

II- Les différents types de portraits

1. Portrait physique ou moral

Un personnage peut être décrit par son aspect extérieur, les traits de son visage, son vêtement. Par exemple, le portrait du vieillard au début de La Peau de chagrin présente du personnage ce qui peut être perçu de l’extérieur : la voix, le teint, la silhouette. Dans ces portraits domine le vocabu­laire concret : champ lexical de l’anatomie, du vête­ment ; champ lexical des sensations.

Lorsqu'un personnage est décrit par ses traits de caractère, ses qualités ou ses défauts, ses apti­tudes, ses goûts, on a un portrait psychologique ou moral. Le portrait du valet de Gascogne, chez Marot, est de ce type :

Gourmand, ivrogne, et assuré menteur,
Pipeur, larron, jureur, blasphémateur.

Dans ces portraits domine le vocabulaire abstrait : lexique moral, champ lexical de la pensée, du sen­timent.

2. Le portrait révèlateur du caractère

Mais le physique et le psychologique sont le plus souvent mêlés dans le portrait. Les por­traits les plus intéressants sont ceux qui, à tra­vers une description physique, parviennent à révéler un trait de caractère. En décrivant Tartuffe : Gros, gras, le teint frais et la bouche vermeille, Dorine fait apparaître la gourmandise et la sen­sualité du personnage. La Bruyère fait de même dans sa description de Giton et de Phédon.

III- Comment analyser un portrait

Pour lire méthodiquement un portrait, il est utile d’être attentif aux points suivants :

1. L’organisation du portrait

Elle met en évidence, suivant un certain ordre, les caractéristiques du personnage. Le portrait peut se faire du plus apparent au plus précis, ou suivant une autre organisation : « L’extraordinaire petit jeune homme » dans Le grand Meaulnes  est décrit de haut en bas sui­vant les pièces de son costume :

Il avait un chapeau haut de forme très cintré qui brillait dans la nuit comme s’il eût été d’argent ; un habit dont le col lui montait dans les cheveux, un gilet très ouvert, un pantalon à sous-pieds.

Un portrait peut être statique (le personnage est immobile) ou dynamique (le personnage est en mouvement).

2. Le point de vue (ou focalisation)

La façon dont est décrit un personnage dépend de la perception de celui qui le regarde. Dans le por­trait du chanoine, le regard du narrateur joue un rôle essentiel. C’est lui qui saisit les ridicules du personnage et le rend comique. Le portrait met donc en jeu le phénomène de focalisation. Ce phénomène agit également sur la tonalité du portrait.

3. La tonalité

Un portrait est rarement neutre ou objectif. L’éloge ou la critique, l’admiration ou le mépris sont per­ceptibles à l’emploi d’un vocabulaire dévalorisant ou laudatif. Dans le portrait du courtisan que fait Alceste, des mots très péjoratifs trahissent sa partialité. Le portrait d’Agnès traduit l’émerveillement d’Horace. Un portrait renseigne donc à la fois sur celui qui est décrit et sur celui qui voit.

III- Les fonctions du portrait

Un des rôles du portrait est d’informer. Lorsqu’un lecteur découvre un personnage dans un roman, un portrait lui permet de se le représenter, de le situer par exemple socialement.

Le portrait a aussi un rôle de révélateur. Il per­met de traduire les sentiments ou les pensées cachées d’un personnage, qui « se lisent » sur sa physionomie. Il fait apparaître aussi, selon la tona­lité employée, l’appréciation et les sentiments de celui qui voit. Il permet parfois de rendre sensibles des phénomènes d’évolution : effets de l’âge, ascen­sion, ou déchéance sociale.

Le portrait enfin peut avoir une fonction symbo­lique, une portée qui dépasse ce qu’il décrit. Par exemple, dans la description du salut des Guermantes, c’est le portrait de toute une classe sociale que fait Proust. Les attitudes de Giton et de Phédon sont une représentation de la richesse et de la pauvreté. La plupart des por­traits de La Bruyère invitent à une réflexion morale, par exemple sur la vanité ou l’absur­dité humaines.