Fiche de lecture sur Poésies d'Arthur Rimbaud : analyse et thèmes principaux

Le recueil "Poésies" de Rimbaud est un recueil de poèmes publié en 1891 après la mort de l'auteur. Il comprend des poèmes écrits par Rimbaud entre l'âge de 16 et 20 ans, dans lesquels il explore les thèmes de la nature, de l'amour, de la religion et de l'art. Ces poèmes sont caractérisés par leur langage innovant, leur usage audacieux de la métaphore et leur grande intensité émotionnelle.

Analyse de Poésies de Rimbaud

► Passage d’une comète.

Celui que Mallarmé présentera comme un « météore » fuse « d’un bond sur la scène », ainsi qu’il définit lui-même le surgis­sement du poème dans la fameuse « Lettre du voyant ». En effet, durant les cinq années qui forment le plus extraordinaire itinéraire poétique de la littérature, Rimbaud compose des poé­sies dont la teneur évolue rapidement, recueillies après coup en une édition qui en fixe d’autorité l’ordonnancement (chronolo­gique à peu près) et les séquences. La diversité de tons est patente entre les premières pièces, où se manifeste encore claire­ment la double influence hugolienne et parnassienne, et l’évolu­tion rapide vers une poésie plus personnelle, énonçant le primat de la sensation et recoupant la ligne brisée d’une biographie erra­tique («Sensation Ma bohème»). Bientôt s’élève une voix dont le soubassement principal est la révolte contre toute forme d’ordre institué (l’Empire, la morale bien-pensante des assis ou la religion), se prolongeant volontiers dans une veine érotique, voire scatologique ( « Vénus anadyomène » ), et assumant pro­gressivement un ton plus libre et fantaisiste. Le temps de l’admi­ration pour Banville s’est désormais retourné en une caricature sarcastique ( « Ce qu’on dit au poète à propos de fleurs » ), par la grâce d’un langage subversif balayant les scories qui empê­chaient son avènement.

► Une poésie radicale.

L’une des premières formes de violence de la poésie rimbal- dienne se rencontre dans les poèmes politiques composés à la suite de la défaite de Sedan et prenant le parti de la Commune qui s’ins- litue à Paris en 1871 ; le ton sarcastique (« L’éclatante victoire de Sarrebrück »), conjuguant parfois la description dramatique à la dénonciation («Le dormeur du val»), fixe la révolte agressive du poète adolescent dans la réalité historique. Toutefois, c’est surtout la rupture avec la vieillerie romantique qui marque la radi- calité de la réforme rimbaldienne : l’aspect provocateur de poèmes tels que « Le cœur supplicié » ou « Mes petites amoureuses » révèle avant tout un bouleversement d'ordre poétique à travers la violence faite à la syntaxe et au lexique qui établit, par l’intermé­diaire d’un goût prononcé pour le pastiche, la grandeur d’un poète virtuose, fougueux et résolument anticonformiste.

Portant toujours plus avant sa volonté novatrice, Rimbaud affirme la primauté de la voyance poétique, dont les « Voyelles » offrent un premier jalon, édictant tout à la fois l’absolue liberté des lois de l’imaginaire sur le réel et l’attention portée au maté­riau brut du langage. Au bout du parcours, le recours à la chan­son et aux formes grêles (l’expression est de Verlaine) ressortit de la volonté d’une expression de l’indicible : à rebours de leur apparenté candeur, nombre de poèmes attestent les premiers

essais d’une distorsion entre la syntaxe et le vers^ s’écartant de plus en plus de la prosodie traditionnelle telle qu’elle s'exprimait encore dans « Le bateau ivre » et s’éloignant des références au réel afin de créer, par la fulgurance des images et la claudication gramma­ticale, un brouillage du sens ( « L’Eternité », « Mémoire » ).

► Vers l’expérience des limites.

Les deux lettres adressées en 1871 à Izambard et Demeny exposent la théorie de la voyance (le fameux « dérèglement de tous les sens » qui institue le délire comme moyen de parvenir à une connaissance d’ordre supérieur), liée par Rimbaud à une technique raisonnée de l’hallucination, afin de faire parler l’Autre qui est en soi en épuisant toutes les possibilités de son moi. On voit en quoi cette position s’oppose exactement à la poésie subjec­tive du romantisme déclinant, puisque, si « Je est un autre », le poème se trouve contraint de s’ouvrir à la voix de l’altérité, prenant acte que l’identité est à la fois l’identique et ce qui est propre au sujet, et accueillant ainsi, par une volontaire défiguration, le neutre dans ses propres mots. Entre raison et folie se lit la volonté d’une libération totale, l’aspiration à une étrange pureté dont là Saison en enfer va affirmer la face noire, en faisant défini­tivement sauter le carcan déjà malmené de la prosodie pour ouvrir le champ à toute la poésie moderne. Si l’on demeure encore, avec les Poésies, dans un relatif compromis formel, les fondements programmatiques de la révolution rimbaldienne s’y trouvent néanmoins clairement établis.

Analyse des principaux thèmes du recueil